Bourre-Pipe 3

par Guillaume Laffly

18/11/16

les maisons pipières

Les grandes sociétés pipières proposent elles aussi leurs modèles de bourre-pipe. Deux me semblent sortir du lot.

La maison Peterson propose des modèles à l'effigie de Sherlock Holmes, bien sur - indispensables quand vous sortez avec votre calabash au bec. Ces modèles sont en cristal teinté.

Chez Tsuge, on propose des bourre-pipes tout en un, tout en bois, tout est dedans, rien n'y manque, c'est petit, bien fait, joli et pratique.

les amateurs

J'avais commencé par poser qu'il y avait deux catégories de personnes qui fabriquent des bourre-pipes, mais un visiteur du site m'en signale une troisième : l'amateur, qui fait cela pour son plaisir, avec les matériaux qu'il a sous la main.

Pierre Barroghel a proposé fut un temps de magnifiques modèles. On ne peut que regretter, tout en le comprenant, qu'il ait mis fin à ses activités. J'ai la chance de posséder l'exemplaire que vous pouvez voir à gauche. La partie métallique vient d'une poignée de porte, il y a du plexiglas, du bois bien sur... et Pierre avait même commencé à travailler, grâce à Trever Talbert, avec des chutes de bruyère et de morta ...

Je parlais des matériaux qu'on a sous la main, dans certains cas cela peut aller loin. FX, un autre membre du Groupe nous a montré ceux qu'il a bricolé dans son atelier :

Pour mieux savoir de quoi il s'agit, je lui laisse la parole :

"Plus le temps de faire des couteaux, pas encore ce qu'il faut pour me lancer dans la piperie ... Alors, pourquoi pas les bourre-pipe ?

Petit essai rapide avec ce que j'avais sous la main. On va l'appeler le "cornillon" , c'est un andouiller de cerf des Indes (sambar). Très peu poreux, pas besoin d'un renfort métallique. J'en utilise depuis des années, ils ne brûlent pas, tout au plus, je les repasse au buffle de temps en temps.

Le couteau est de moi aussi, le scrimshaw est de Greg Delaunay, la pipe est de Rad Davis.

Je reviens sur les bourre-pipe, et sur le fait de les doubler ou pas. En voici quelques uns, ceux que j'avais sous la main. Celui en buis a au moins 20 ans, c'est un de ceux que j'ai la plus utilisés, j'ai dû d'ailleurs le retailler, car il avait une belle volute sur sa partie supérieure, qui s'est cassée. Comme vous pouvez le constater, le bois ne brûle pas, il est toujours protégé par la cendre. J'en ai profité pour le passer un petit coup au buffle, il était tout noir, et j'ai été surpris de voir la jolie patine qu'il avait prise.

Pour ceux en bois de cervidé, ici nous avons du chevreuil (bois assez plein), et du cerf de Virginie (whitetail deer). Pour le cerf européen (élaphe), il est assez rare de trouver des andouillers de tout petit diamètre, sauf sur certains jeunes daguets. Et il est impossible de partir d'un gros andouiller et de le réduire en ponçant, car ils sont très poreux et la partie dure ne mesure que quelques millimètres. Le bois des jeunes chevrillards est de loin le plus intéressant, celui des vieux brocards est trop large. Jean-Luc, en Belgique, il y a pas mal de daims dans les jardins, tu peux toujours essayer de récupérer une palme, si tu connais quelqu'un qui en élève, elles tombent chaque année, et si vous avez des amis dans le grand Nord, les bois de renne sont un matériau absolument extraordinaire, qui se polit remarquablement et qui est très dense. Il est facile de neutraliser les parties poreuses, avec de la colle cyano, elle devient neutre après séchage.

Pour les bois de chez nous, tous les fruitiers font l'affaire, et les bois durs en général. Le buis est un vrai régal à travailler. J'en ai dernièrement fait un en pine de morse, oosik comme le nomme les inuit, c'est l'os pénien du bestiau, je vous en montre un à côté d'une petite pipe de M Kabik. Celui-là, c'est un tout petit, il peut mesurer jusqu'à 1 m."

Et puisqu'il est question du Groupe de Discussion, vous pouvez voir ici les bourre-pipes réalisés par les membres du groupe, lors des concours.

Qu'il me soit aussi permis de citer ce visiteur attentif dont je parlais plus haut : en dessous, la photo qui démontre ses talents d'"improvisation :

"Il serait bon d'y ajouter une troisième catégorie, celle des amateurs improvisateurs. On fait souvent flèche de tout bois quand on a oublié le sien, ce qui m'arrive souvent. Souvent, c'est l'extrémité du petit doigt de la main droite qui se carbonise dans la plus pure tradition Mucius Scaevola. Une fois, je me suis fait offrir par un golfeur de rencontre quelque uns de ces Tees chers aux cruciverbistes, le modèle d'exercice, en bois. Il m'est arrivé d'utiliser de la douille de balle d'exercice abandonnée par des bidasses en manœuvre, ou de la douille de Lebel ornée par un poilu. Et puis un jour où j'utilisais un bourre-pipe modèle standard, je me suis fait remonter les bretelles par un puriste, qui s'insurgeait contre l'intrusion d'un métal froid dans le foyer d'une honnête bouffarde. C'est pourquoi, à la moindre balade, il m'arrive de sortir l'Opinel et d'improviser un bourre-pipe en bois de bourrepipier, c'est-à-dire avec le premier matériau ligneux qui me tombe sous la lame. Certains restent à l'état brut, d'autres tirent profit des formes de la branche, d'autres sont tarabiscotés en style plus ou moins kitsch ou néo-primitif (pardon, néo-premier, ou est-il plus politiquement correct de dire néo-Branly pour ne vexer personne ? ), poncés à la lime à ongle de carton. Les uns restent définitivement au fond d'une boîte et n'auront servi qu'une journée, d'autres sont repris à la maison, traînent au fond des poches, se patinent, se font accepter, deviennent quotidiens. C'est dire que le sujet est loin d'être épuisé."

Effectivement, le sujet est inépuisable. La première version de cet article datait d'avril 2006, depuis il y a eu de nouveaux venus, d'autres pistes ont été explorées, avec plus ou moins de bonheur - et ça n'est pas fini ...