Conseils à mon jeune moi

par Trever Talbert, traduction de monsieur X

18/11/10

Ce post provient de la réponse que j'ai faite à un jeune posteur sur un forum que je fréquente, concernant ses espoirs et défis de devenir un jour un écrivain à plein temps. Au cours des 12-13 années de ma carrière de pipier à plein temps, j'ai eu de nombreuses occasions de parler à des gens qui se lançaient dans le business, et j'ai vu avec tristesse nombre de personnes en sortir. Comme je sais qu'il y a quelques aspirants pipiers qui lisent mon site, j'ai pensé replacer ici mes commentaires, avec l'espoir qu'ils puissent s'avérer utiles à quiconque penserait se lancer dans le business de fabriquer des pipes (ou tout autre projet professionnel créatif).

Cependant, ceci n'est pas censé être un post concernant les secrets techniques ou les méthodes pour sortir dans les bois pour y trouver l'inspiration – Si vous voulez être un artisan créatif, vous pouvez trouver tout ça par vous-même , et la majeure partie de ce que vous disent les gens dans des bouquins ou des cours à propos d' "Accéder à votre créativité intérieure" est du bla-bla élaboré plus pour vous vendre un livre que pour aider qui que ce soit. Ceci avec l'intention que ce soit un avis utile.

Conseil N° 1

C'est un processus, pas une course. A la réflexion, je pense qu'une des plus grandes différences entre les artisans des domaines créatifs et les aspirants qui chutent, est ceci – l'acceptation de la réalité que, quoi que vous ayez écrit, dessiné, sculpté, ça ne vaut, en nourriture et revenu, que le temps que vous y avez consacré, et vous devez continuer à créer encore plus. Le travail ne concerne pas les créations individuelles, mais bien le processus de continuer à travailler et être capable de continuer à produire des objets d'un niveau de qualité que les gens achèteront... ce qui en réalité est BEAUCOUP plus difficile que de faire le "bon coup" dont en général tout un chacun pense que ça va le faire. Nombre de gens pensent qu'il leur suffit de faire une grande chose, pour pouvoir ensuite en profiter à jamais, mais ce n'est pas le cas. Aussi difficile qu'il soit d'obtenir les permières percées, il est vraiment encore bien plus dur de maintenir cet intérêt, parce qu'il est relativement facile de de faire quelque-chose qui capte l'attention et devient la coqueluche du mois, mais le truc est de maintenir ceci en état de marche une fois que vous n'êtes plus le tout nouveau talent dont tout le monde parle. C'est un schéma que j'ai vu dans le marché des pipes de collection, où un jeune type fait quelque-chose de nouveau et retient l'attention, ensuite de quoi tout le monde va parler de lui pendant quelques mois et il va être submergé de commandes, puis quelqu'un d'autre va apparaître en tant que nouveau-nouveau type, le précédent va voir tout son business s'évaporer et, une année plus tard, tout son matériel est à vendre sur les forums de pipiers parce qu'il ne peut pas vivre de ses ventes occasionnelles.

Tout ceci est un grand avertissement que, quelle que soit la difficulté de faire les quelques premières ventes de vos produits, il est dix fois plus dur de les développer en un travail à plein temps.

Conseil N° 2

Motivez-vous. Si vous ne "le" faites pas pendant tout votre temps libre, n'apprenez pas à son sujet et ne perfectionnez pas votre habileté, il est fort probable que vous ne le ferez pas, quels que soient vos avantages (talent, argent pour démarrer, temps libre, etc.). Je n'ai eu aucune aide au démarrage – mes parents ont joliment dévalorisé ma carrière créative d'un "Oh, super! Mais quand vas-tu grandir, devenir sérieux et te trouver un vrai boulot?", aussi ai-je dû me motiver tout seul (et j'aimerais bien souligner qu'il ne s'agit pas ici d'incriminer mes parents, dans le genre de ces foutues fêtes de la pleurniche "Nous sommes tous des enfants maltraités", parce que je me considère comme incroyablement chanceux sur le plan parental, d'avoir eu deux parents stables et aimants, dotés de boulots stables, qui ont pris soin de moi et m'ont fourni un foyer heureux pour y grandir, ce qui est plus que pas de mal de gens peuvent en dire. Juste qu'ils ne comprenait absolument pas pourquoi j'étais "mordu". Quand j'ai dit à mon oncle que je souhaitais aller à l'université pour devenir un artiste, son sage avis fut: "Sois bien sûr de suivre le cours des 101 trucs et astuces pour survivre avec 1'000 $ par année".)

Le truc marrant, dans tout ça, c'est que je ressens l'absence de tout soutien familial dans la poursuite d'une carrière créative comme traduite directement en une plus grande détermination à faire justement ceci. Au fil des années, j'ai vu bon nombre de gars entrer dans le business en fanfare et avec de grands avantages pour démarrer, et durer environ deux ans... pas à cause de manque de talent ou de soutien, mais par manque de détermination. Survivre en tant que professionnel de la création est dur. Voilà quelque-chose qui sonne comme de la mythologie , mais ça n'en est pas – Alors que j'apprenais mon art, je le faisais par essais et erreurs. Pendant un certain nombre d'années, j'ai travaillé dans le coin d'un garage non chauffé où je me rendais chaque soir emmitouflé dans quantité de pulls et vestes, et des gants auxquels j'avais coupé les bouts des doigts, et je m'asseyais, travaillais et apprenais pendant que ma respiration faisait de la buée autour de moi. Je n'avais pas pour moi un titre universitaire en art, ou une épouse pour payer toutes les factures pendant que j'apprenais, ou un soutien financier régulier de la famille. Ce que j'avais, c'était une obsession de faire cette chose, quel que pût en être le revenu. Si vous voulez devenir un artisan professionnel, le meilleur avis que je puisse donner est d'aller dans votre atelier/bureau/studio et d'y travailler sans relâche votre habileté, et d'être capable de vous motiver à le faire. Et si vous pensez: "Mouais, j'aimerais bien devenir artiste, mais je ne me sens pas trop de passer mes soirées à peindre, je préférerais jouer à des jeux vidéo"... alors vous devez être honnête avec vous-même et réaliser que vous n'en ferez pas un métier. Beaucoup de gens lisent des choses au sujet des artistes et tombent tellement sous le charme du style de vie qu'ils en perçoivent qu'ils commencent à vouloir ça, ce type de boulot, sans réellement avoir la motivation de poursuivre l'art en question.

Conseil N° 3

Faites-le pour une raison. Je peux comprendre le désir d'écrire quelque chose qui émeuve l'assistance. Mon propre but en tant que pipier est plus simple – à la base, j'essaie de procurer aux gens de la relaxation et du soulagement du stress. Ca me rend heureux de savoir que, tout autour du monde, des gens rentrent à la maison après une affreuse journée de travail et peuvent s'asseoir avec un bon film, un bon bouquin ou autre, et profiter d'un fumage détendu avec quelque-chose que j'ai fabriqué, et c'est ainsi que je suis à même d'introduire un peu de bon karma dans le monde, qui aide les gens à apprécier juste un peu de temps paisible et personnel au milieu de toute l'agitation moderne. Parce qu'elles sont des choses naturelles, qu'elle ne souffrent pas d'obsolescence et n'ont pas besoin d'être changées tous les trois ans, les gens ont tendance à s'attacher aux pipes, les gardent pour toujours et en font des objets de confort personnel, ce qui me rend heureux. Ca ne va pas émouvoir quiconque, mais parfois un peu de confort dans un monde rude peut suffire.