Test d'une Prungnaud

par Mathieu Hirondelle

03/12/07
une pipe de Gérard Prungnaud

Durant la visite de l'atelier mon choix s'est immédiatement porté sur deux pipes de forme classique. La première (n°8 au catalogue) en finition blanche disponible et la seconde (n°10) enfumée que j'ai commandée.

La prise en main est tout de suite agréable, le début du culottage s'est effectué le soir dans les rues ventées d'Uzès. Découvrir une pipe à l'extérieur n'est pas forcément la meilleure manière mais je dois reconnaître qu'elle s'est laissée apprivoiser sans chichis. J'ai rapidement fumé de grandes pipées en gardant la pipe en bouche sans aucune fatigue de la mâchoire.

Etant parti pour quelques jours je n'avais emporté que deux tabacs l'Artisan Blend d'Ashton et l'Embarcadero de Pease.

Je connaissais déja la formidable capacité de ces pipes à restituer la saveur d'un tabac mais je n'avais pas encore testé un latakia complexe (l'Artisan Blend contient des tabacs orientaux, du latakia syrien et du perique en petite quantité).

Alors le verdict est sans appel la saveur complexe de ce mélange se livre entièrement, le goût est d'une grande définition c'est à dire qu'il n'y a pas d'interaction entre le tabac et la pipe. Le goût est restitué et on ne sent que le tabac. Par exemple j'ai découvert sous un nouveau jour l'Embarcadero qui m'avait peu séduit dans différentes bruyères.

D'un côté cela permet de saisir les nuances complexes d'un tabac et évite les désagréments d'une bruyère qui peut être capricieuse et écraser tel type de tabac.

D'un autre côté cela prive de ces associations lorsque une bruyère et un tabac se rencontrent et se marient pour le meilleur...

En ce qui concerne l'exécution technique. Le perçage à trois millimètres me semble insuffisant ainsi que l'ouverture de la lentille trop serrée à mon goût. J'ai depuis modifié la lentille mais je ne toucherai pas à la tige. Quant au perçage de la tige il n'est pas exactement centré avec le perçage du floc avec un décalage de deux bons millimètres.

  1. voici ce que donnent le floc (en noir) et le perçage de la tige (gris) mis bout à bout, une fois le tuyau engagé dans la tige. L'alignement laisse à désirer

  2. une fois le tuyau démonté il est impossible de faire déboucher une chenillette dans le fourneau : comme si le perçage avait été réalisé en deux parties, par la tige et par le fourneau formant un angle

Malgré ces soucis la pipe s'est révélée être une fumeuse correcte le tirage se fait sans effort particulier et le tabac se consume entièrement. Au cours des jours derniers j'ai alterné latakias, virginias en ayant toujours une bonne définition du goût. Avec le Black Mallory de Rattray j'ai été surpris par la “haute définition” des virginias.

J'ai reçu cette semaine ma deuxième Prungnaud.

C'est la forme n°10 au catalogue, cette pipe comme vous pouvez le constater sur la photo a une teinte grise. C'est une pipe enfumée selon la technique japonaise du Raku.

Lors de ma visite a l'atelier de Gérard Prungnaud cette pipe m'avait tapé dans l'œil et c'est encore le cas. Au cours de mes dix petites années de fumage de pipe j'ai eu différentes pipes en terre “folkloriques” à tête travaillée, souvent un vieux grincheux enturbanné avec une très très longue barbe... ce qui ne correspond pas forcément à un look “djeuns” (http://wiki/djeuns). Par contre je trouve la forme de cette pipe particulièrement inspirée et elle soutient la comparaison avec les formes modernes de pipes de bruyère.

En ce qui concerne l'exécution technique j'ai retrouvé le même défaut d'alignement du perçage de la tige et du floc. Mais bon cela ne gène pas le tirage outre mesure depuis que j'ai ouvert la lentille.

En conclusion je dirai que l'on sent un vrai souci du détail dans la production de Gérard Prugnaud, les formes sont inspirées et agréables à tenir en main. Il y en a pour tous les goûts: des simples des droites, des courbes et des figuratives. Autre fait non négligeable le rapport qualité de ces pipes est très intéressant. Le contact de la terre tiède au creux de la main est agréable lorsqu'il fait froid dehors. Malgré un perçage un peu étroit et quelques défauts techniques ce sont des pipes pour goûter le tabac qui délivrent un goût ample et qui révèlent les arômes d'un tabac. Je suis en train de regoûter tous mes tabacs ouverts j'ai fait quelques découvertes agréables.