Bouffardes bavardes n°3

par Charles & Simon

04/03/13

Vieux Bohan de Joseph Martin

Vieux Bohan Joseph Martin

Composition : Semois

Un nez typique, sur la sciure de bois, le livre ancien et la cave humide.

Comme tous les Semois, les feuilles crépitent sous la flamme. Les arômes de la Semois s’expriment dès les premières bouffées : rusticité, caractère, puissance. Légèrement humide et bien souple, le tabac est forestier pour une part, sur la mousse, l’écorce, les champignons ; l’autre part évoque le papier mâché, humide, adjoint de quelques épices.

Le tabac évolue vers un goût plus sombre, sur un tabac noir mêlé de noix et de bois. Il est plus charnu, sans jamais être vulgaire. Le final est essentiellement boisé et grillé, roboratif.

C’est un des Semois les plus complexes et les plus fins qu’il m’ait été donné de goûter. Il y a là une proximité aromatique évidente avec certains cigares. A titre comparatif, il est moins rustique que le Manil, plus équilibré et plus fin.

Points forts : richesse aromatique, roboratif, équilibre
Points faibles : linéaire malgré une légère évolution sur le deuxième tiers, combustion trop rapide

15/20

C’est un grand tabac du terroir européen. Sa coupe est plutôt large et je précise que le pot de semois ayant servi à cette dégustation a plus d’un an de cave. Ce pot dégage une odeur de feuilles mortes, de vieux cuir, de cigare, de fruits de mer, et une certaine fraîcheur.

L’allumage est très aisé compte tenu de la faible teneur en humidité, et la combustion, rapide. Fin et puissant, le Martin donne vite la mesure : arômes de cigare, boisé résineux, sciure de bois, vieux livre, cave humide.

Mais ne nous emballons pas, tout au long de la dégustation, le Vieux Bohan est linéaire et sans surprises. Ses saveurs sont uniques et complexes. La fin de fourneau est quelque peu vulgaire et agressive.

Il est à mon goût le meilleur Semois.

15/20

Nous sommes bien d’accord : le Vieux Bohan de J. Martin est le meilleur Semois en Ready Rubbed. Comme tous les Semois (sauf Bouchon), il est fortement conseillé de le consommer à un taux d’ hygrométrie relativement bas (autour de 10%). Assurément, ce Semois ne contient pas que du tabac des vallées embrumées des Ardennes belges.

Hal O’The wind de Charles Rattray

Composition : virginies

Des arômes de fruits secs se dégagent de la boîte cylindrique, sur les abricot secs, les pruneaux.

Le tabac est doux et se consume bien. En bouche, les arômes de fruits secs sont bien présents, sucrés. Un côté chaud et légèrement brioché renforce le caractère gourmand du mélange.

Au fil des bouffées, le tabac s’arrondit et devient plus onctueux, plein en bouche, sans jamais être piquant. Il n’est cependant pas d’une grande complexité, les arômes sont fondus, simples, mais suffisamment riches et équilibrés pour être intéressants.

Le côté brioché prend de l’ampleur sur le deuxième tiers, avec un léger assombrissement général du goût. Le tabac glisse alors des fruits secs vers la pâte d’amande, et le côté brioché devient dominant en bouche, faisant preuve d’une légère mais agréable évolution sans toutefois gagner en complexité.

Le tout reste léger, même sur le derniers tiers, ou le pain grillé, presque brûlé, avec quelques résidus de sucre, domine.

Points forts : riche et fondu, équilibré et évolutif
Points faibles : manque de complexité, non roboratif

15/20

Je précise que le mélange ayant servi aux dégustations est âgé d’environ six mois. Il semble déjà se révéler en dégageant une odeur de fruits secs et de pruneaux d’Agen.

La coupe en Ready Rubbed rend l’allumage difficile, mais permet aux Virginies rouges de libérer des saveurs de fruits secs, de caramel et un léger fumé.

Il faut attendre que la pipe chauffe pour sentir la pleine capacité gustative du tabac. Rondeur, douceur des arômes printaniers.

Les Virginies sont d’excellente qualité, et leur dégustation est des plus agréable. Cela étant, pour ce qui est du commentaire, je ne peux juger le Hal O’ the Wind singulier : il est d’un grand classicisme et la peur de me répéter ne m’ en fera pas dire plus.

15/20

L’avis général est à peu près le même. Quant aux divergences, elles reposent essentiellement sur certaines caractéristiques aromatiques : les arômes de brioche, de fumé, ne se retrouvent pas dans chaque commentaire.

JackKnife plug de G.L. Pease

JackKnife plug Pease

Composition : virginies rouges et blonds, dark fired Kentuky

Du plug sombre et dense se dégagent des notes de terre humide, de fruits secs (abricot), avec un côté sombre, légèrement giboyeux et épicé.

Le tabac a du corps, les arômes de terre et d’épices (poivre noir, très présent), sont dès les premières bouffées portés par une puissance certaine.

La teneur en sucre est faible mais l’équilibre est bon. Je ressens un léger picotement sur la langue, plus prononcé en rétro-olfaction, qui n’est toutefois pas désagréable.

Au deuxième tiers, de la terre, toujours, un peu de tourbe, du poivre noir et une légère amertume en bouche. Les arômes sont sombres et virils.

Le tabac n’évolue que peu jusqu’au final, sur un goût sombre, de terre humide, de tabac noir, avec une pointe surprenante de cannelle, et un soupçon d’acidité. La fumée est plus ronde en bouche, presque veloutée.

Le tabac se fume sans problème jusqu’au dernier brin, à condition d’avoir l’estomac un tant soit peu rempli : le tout est amplement roboratif.

Je conseille une découpe et un émiettage fin pour soustraire tout problème de combustion à la dégustation.

Points forts : richesse aromatique, roboratif, équilibre, rondeur
Points faibles : linéaire, combustion difficile si coupe trop large

13/20

Nous avons laissé sécher le plug après découpage. Il sent la vanille, le gruyère périmé, les épices et dégage un léger fumé.

Ce Virginie/Kentucky est corsé, épicé (surtout poivre). Le fumage laisse une sensation de piquant sur la langue. Sans vulgarité, il nous invite à déguster sa fumée chaude et épaisse qui dévoile des arômes terreux et boisés.

l convient aussi bien à une promenade qu’à la digestion d’un repas généreux. Le mélange de Virginies rouge et blond lui apporte rondeur et équilibre. Le Kentucky nous rapproche du monde sylvain, avec quelques douces saveurs de champignon.

C’est une invitation au plaisir sans études : en effet, le Plug est linéaire et manque bel et bien de complexité.

13/20

Des commentaires à la note, des qualités du mélange aux critiques, nos avis se rejoignent. Tout est dit.

Frog Morton on the Town de Mc Clelland

Frog Morton on the Town

Composition : virginies, latakia, feuilles de Basma

A l’ouverture de la boîte, un arôme de caramel au beurre salé accompagné de quelques notes vanillées et un fumé subtil. Après quelques temps et un séchage de rigueur, le fumé se fait plus présent.

Un équilibre gourmand se forme entre le caramel au beurre salé mêlé d’une pointe de vanille et le fumé subtil, qui se révèle bien présent en bouche. La fumée est douce, et le tabac manque à mon goût de corps, de rondeur.

J’ai beaucoup de mal à croire que les feuilles de Basma seules puissent apporter au mélange cet arôme si gourmand sans l’aide de quelque aromatisation, bien que le tout reste naturel et cohérent.

Le mélange évolue en milieu de pipe : le côté gourmand des orientaux et des virginies va vers le caramel grillé et la noix, tandis que le fumé gagne en profondeur et en intensité, avec une très légère pointe amère. Le tout reste bien équilibré.

L’ensemble est plus dense au final, et gagne en rondeur (enfin !). La créosote domine complètement la fin de pipe. J’aurais aimé un peu plus de virginie rouge.

Le fait qu’il ne soit pas rassasiant et plutôt accessible par son manque de complexité en fait un bon tabac de tous les jours, malgré son originalité. Un tabac à la croisée des chemins, qui peut convenir à toute heure et en toute occasion, pas totalement anglais, pas vraiment aromatique, mais toujours plaisant.

Points forts : très gourmand a fortiori pour un mélange anglais, équilibre, évolution, coupe, combustion.
Points faibles : non roboratif, manque de corps et de complexité, aromatisation non avouée

14/20

Après trois ans de cave et une large coupe, il y a des choses à sentir dans le pot ! Caoutchouc vanillé, marron (gland), «sauce» chimique sucrée et vulgaire.

Les premières bouffées sont surprenantes : on sent la «sauce» rester et le tabac développer ses saveurs. Le mélange des deux est exquis - j’imagine que l’odeur pour les passifs doit être agréable. Durant le premier tiers, le Frog est doux et l’arôme que l’on croit chimique au nez se complexifie à mesure que la pipe chauffe.

A mon grand étonnement, le «parfum» reste et le tout se remplit de suavité et de rondeur. Il y a peu d’évolution, mais je suis surpris au troisième tiers par une montée en puissance coïncidant avec la disparition du sucre.

Ce tabac est gourmand, légèrement corsé sur la fin.

12/20

Le FMOTT est original, très plaisant sur la première moitié de la pipe, sans pour autant s’effondrer sur l’autre moitié, comme la plupart des mélanges aromatisés. Un mélange de bonne qualité que nous avons du mal à classifier dans une catégorie de tabacs. L’aromatisation est indéniable, bien que le tout reste naturel.

Kensington de G.L. Pease

kensington pease

Composition : virginies, orientaux, latakia chypriote

Un nez complexe, sur les fruits secs, légèrement vineux, du fumé en arrière plan.

C’est à mon sens l’expression d’un véritable balkan sur le premier tiers, de par la composition et l’équilibre du mélange. Le fond est fumé, mais jamais lourd ; il est l’ossature du mélange, nécessaire et subtil. Le reste se partage entre les virginies, sucrés mais pas trop, ronds, bons sans être exceptionnels, et les orientaux, qui apportent de la complexité à la palette aromatique par l’apport de notes boisées et épicées.

La sucrosité des virginies rouges et blonds mue peu à peu en une acidité qui rend le mélange moins gourmand. Puis, la rondeur mise à part, les virginies s’effacent devant le couple orientaux-latakia.

A ce stade (moitié du bol), les orientaux dominent par leurs arômes épicés mêlés d’un peu d’écorce, sur un fond de latakia, fumé et plus sombre qu’au début. Le mélange se fait alors moins complexe qu’au départ, moins équilibré.

Le tabac est bon, sans atteindre des sommets de richesse et de complexité, quoiqu’un peu ennuyeux au final après avoir pourtant très bien commencé. Il ne parvient pas à se singulariser dans la masse des balkans disponibles sur le marché. Un « tabac de tous les jours », en somme, qu’on fume sans y porter toute notre attention, certain de ne rien perdre d’exceptionnel.

A noter que certaines pipes accentuent la rondeur et la sucrosité (virginies rouges) sur le premier tiers, tandis que d’autres assombrissent d’avantage le mélange. Dans tous les cas, un bon démarrage mais une fin monotone, quoique bien construit et satisfaisant.

Points forts : aspect, combustion, coupe, première moitié équilibrée et savoureuse
Points faibles : rétrécissement aromatique et linéarité du final

12/20

Trois tabacs différents, trois ans de cave, mais une unique odeur fumée très classique au nez.

Les Orientaux mènent la danse, et sont de bonne qualité. Le mélange n’est pas singulier, et pourtant sans particularité : aucune surprise de la part des différents tabacs.

Il faut attendre le troisième tiers pour sentir la rondeur et l’arrière-goût des Virginies.

Je trouve ce Kensington très mal équilibré et simplet. Décevant, car avec plus d’ingéniosité dans les proportions - de façon à laisser s’exprimer chaque ingrédient – ce mélange aurait un grand potentiel.

10/20

Nos appréciations sont divergentes, ne se rejoignant que sur la dominance des orientaux qui fait de ce tabac un balkan qui ne se distingue pas des autres. L’équilibre du mélange est clairement en discussion entre nous, ce qui incitera le lecteur à forger sa propre opinion, en tenant compte des nôtres.